L'urbanisme comme facteur de cohésion sociale

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L'urbanisme comme facteur de cohésion sociale

L’urbanisme étudie le territoire, les villes et leurs développements futurs. Il projette et planifie les modifications territoriales par la programmation et la rédactions de normes spécifiques. Par “Cohésion”, terme dérivé du latin, on entend quelque chose de fortement uni.

Le terme “Cohésion sociale” apparaît à la fin du XIXe siècle dans les études du sociologue et anthropologue français Emile Durkheim. Selon Durkheim, une cohésion sociale solide est propre à déterminer des situations matérielles comme le travail, la maison, la santé, l’instruction, s'y mêle également la sûreté sociale, l’ordre. Et aussi l’existence de relations sociales porteuses d'échanges d’informations et de solidarité, la participation à la gestion des institutions afin de créer l'identité et l’appartenance à un groupe. Le lieu dédié de la cohésion sociale, c’est l’agglomération urbaine, du village à la ville.

Le lieu dédié de la cohésion sociale, c’est l’agglomération urbaine, du village à la ville.

Pour moi, la cohésion sociale est comme un arbre qui grandit lentement, mais il suffit d'un orage pour l’abattre. Elle est composée de beaucoup de facteurs, et l’urbanisme en est un. C’est enfin un jeu de forces en équilibre. L’altération de quelques-uns des composants vient à créer sur le territoire des fragilités.

De la Révolution Industrielle à la seconde moitié du XVIIIe siècle

En abandonnant la séduisante histoire du développement de la ville dans l’antiquité, il devient utile de considérer la période historique qui part de la Révolution Industrielle, à partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle.

Pendant ces deux siècles et demi, l’urbanisme a vu la contribution de remarquables personnalités qui ont su s'exprimer dans des études théoriques, par la conception d’installations harmonieuses pour la classe ouvrière (les soi-disant utopies), les démolitions impériales du centre-ville dans quelques capitales européennes. Et sont nées les nouvelles villes en Amérique et dans les pays coloniaux, il y a eu le paternalisme des villages ouvriers et puis la recherche rationnelle d’espaces minimaux d’habitations.

Construction du Centre Beaubourg, Paris

Pour moi, la cohésion sociale est comme un arbre qui grandit lentement, mais il suffit d'un orage pour l’abattre. Elle est composée de beaucoup de facteurs, et l’urbanisme en est un. C’est enfin un jeu de forces en équilibre. L’altération de quelques-uns des composants vient à créer sur le territoire des fragilités.

Avec la vitesse d’un visiteur qui entre dans un musée après l’heure de fermeture et passe rapidement entre les oeuvres d’art, en s’arrêtant sur les plus connues ou sur celles qui lui donnent le plus d'émotion, à l'avenant je rappelle quelques-unes des personnalités de cette période (XVIIe siècle – XXe siècle), qui ont influencé l’urbanisme.

Des bâtisseurs, concepteurs de lien social

- Charles Fourier et sa conception sociale fondée sur les Phalanges et sur les Phalantères (ou Familistères),
- Robert Owen et ses plans communautaires pour un socialisme coopératif,
- Raymond Unwin avec la précise détermination des règles et paramètres pour une ville plus harmonieuse, formée de maisons fonctionnelles entourées de verdure,
- F. L. Wright, qui voit dans la liberté de l'individu son amélioration personnelle. Pour lui, il faut réaliser un projet harmonieux, organique, entre les hommes et la nature, qui est décrit dans sa vision de Broadacre City,
- Le Corbusier, diffuseur, avec les publications et projets réalisés, d'une nouvelle architecture et d’un nouvel urbanisme.
- Yona Friedman, notre contemporain, l’infatigable apôtre de l’idée d'autoplanification, déterminant dans ces moments de la crise.

Dymaxion house, de l'architecte américain B. Fuller

Entre projets pharaoniques et espaces sous-utilisés

Mais, en revenant au présent, je pense que l’urbanisme se trouve devant une bifurcation concernant l’usage du territoire.
Aujourd’hui, il y a la coexistence des projets pharaoniques qui célèbrent l’économie dominante et la construction des quartiers morts, fils de la bulle spéculative. Les villes sont entourées par d'énormes agglomérats d’habitations très sous-utilisés et économiquement dépréciés, par la carence d’acheteurs dans l’actuel moment de forte crise récessive.

D’un autre côté, avec le “new urbanism”, on cherche, avec l’urbanisme participatif, à impliquer les citoyens, plus actifs dans les choix du futur du territoire, avec un résultat ici plus partagé. On peu citer à propos des techniques pour impliquer le citoyen : la méthode Charrette (travail rapide en collaboration) et le Planning for Real, qui se fonde sur l’implication des techniciens et habitants autour d’un plastique du lieu concerné.

Que faire pour que l'urbanisme favorise davantage la cohésion sociale ?

Quoi faire ? Dans ce moment historique, les pointes des ciseaux entre la richesse de peu et la vie des autres, on va s’éloigner jusqu'à l'écartement maximum. Un écartement ultérieur de force pourrait porter à la fracture finale entre les classes sociales. Les enquêtes, les statistiques, les archives nationales et internationales, mais surtout l’observation de la réalité nous donnent une situation où la cohésion devient exclusion.

Ma vision personnelle pour un urbanisme partagé prend son origine dans de simples observations. Il faut récupérer la fonction des plans du territoire plus aisés et réalisables. L’intervention des institutions publiques doit récupérer sa capacité directrice sur les intérêts privés. Il faut projeter des interventions avec utilisation zéro du territoire agricole, utiliser le plus possible les centres et les périphéries dégradés. Donner une nouvelle vie aux villages abandonnés loin des centres habités et dans les montagnes, ici aussi, pour rétablir le contrôle ambiant et hydrogéologique, construire des nouveaux quartiers sur les grandes surfaces abandonnées des zones industrielles, militaires, commerciales, après leur éventuelle réhabilitation.

Etablir des modalités de sauvegarde pour un usage social des propriétés de l’Etat

Etablir des modalités de sauvegarde pour un usage social des propriétés de l’Etat ; on sent toujours qu'il faut les vendre pour abattre le déficit des nations. Je pense qu’elles sont à tous les citoyens : le fruit de leur histoire, de leur travail, des leurs souffrances.
Faire des plans d’incitation à la démolition et à la reconstruction des maisons les plus vieilles, pas les plus antiques. Pour les entretiens et les adaptations aux nouvelles normes, il y a des coûts croissants : beaucoup ont aussi payé deux fois leur maison qui n’est pas un monument national et n’a pas redoublé de valeur.
Il faut favoriser le projets privilégiant les maisons en longueur ou avec peu de plans, qui s’adaptent mieux à l’auto-construction. Les bâtiment en hauteur seraient limités à une utilisation pour les services au public.
Enfin ,chercher de sensibiliser les personnes à une recherche du bonheur qui va limiter le cycle travail-production-consommation.

Coopération, partage, coalition, troc, potagers collectifs, banques de temps, car sharing, cohousing, immeubles solidaires… tolérance

Je vous fais une liste de mots comme un feu d’artifice qui éclaire une fête d’espoir. Je pense que vous les connaissez : coopération, partage, coalition, troc, potagers collectifs, banques de temps (1), car sharing (2), cohousing (3), immeubles solidaires… tolérance.
On peut me dire : “Voilà le vieil idéaliste, utopiste…et l’argent…et le profit, et la Bourse International…on ne mange pas les mots…
C’est possible, mais je pense qu'il faut croire en un futur moins égoïste, et avec moins de solitude.
Parfois, comme dans un rêve, je vois les ombres des temples étincelants qui s’allongent sur le nouveau village de la cohésion sociale, mais un rayon de soleil s’enfuit et se pose sur le bourgeon d’un futur meilleur, comme parfois il a succédé aux moments plus dramatiques de l’Histoire.

 

Par Mario D'Adda

 

(1) Système d'échanges de services basé sur les équivalheures et le temps pour échanger services et moyens sans argent comme on peut le faire entre amis. Source banquedutemps.com

(2) ou autopartage : système dans lequel une société, une agence publique, une coopérative, une association, ou même un groupe d'individus de manière informelle, met à la disposition de « clients » ou membres du service un ou plusieurs véhicules. Plutôt que de disposer d'une voiture personnelle qui reste l'essentiel de son temps au garage ou sur une place de stationnement, l'utilisateur d'un service d'autopartage dispose d'une voiture qu'il ne finance que pour la durée de son besoin. Le reste du temps, la voiture est utilisée par d'autres membres. Source Wikipédia

(3) ou cohabitat, ou habitat participatif : forme de communauté intentionnelle qui réunit quelques familles qui désirent vivre selon une manière commune dont ils ont défini les qualités. Le concept de cohabitat comporte en amont la définition d'un modèle d'aménagement immobilier qui facilite les échanges humains au sein du groupe ; chaque dimension de l'aménagement physique des lieux est étudiée collectivement. Le groupe des futurs habitants est maître d'ouvrage pour les trois phases immobilières : la conception, la réalisation et l'aménagement de l'ensemble d'habitations. Le cohabitat comprend d'une part des parties privatives et d'autre part des parties communes. Très généralement, la partie privative comprend le lieu de vie "intime", privé de l'unité familiale, les parties communes étant destinées aux activités partagées entre plusieurs familles, et aux rencontres informelles. Ces dernières parties peuvent aussi offrir des lieux de service (buanderie, salle de loisirs, chambres pour les invités, atelier, etc.). Source Wikipédia

 


A propos de l'auteur
Mario D'Adda a poursuivi ses études à l'école polytechnnique de Milan, à la Faculté d'architecture. Il est co-auteur, avec Emilio Venturini, de l'ouvrage La scuola dei geometri, L'Istituto Nicolò Tartagila dal 1862 a oggi, Grafo edizioni-Brescia 2000. Il réside en Italie, à Brescia, en Lombardie. Il parle couramment français.

Aux internautes

Quelle est, selon vous, la cité idéale ? Comment imaginez-vous l'habitat du futur ?


 

Bibliographie

Cliquez sur l'image pour accéder au point de vente de l'ouvrage. Certains de ces livres peuvent être consultés gratuitement en ligne.

 

 

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